Forum Arkhan

Après avoir déposé son oeuvre, Zephyr avait commencé à se promener dans les rues de sa glorieuse cité, en attendant les résultats. Cependant, au dernier jour des votes, il croisa une personne qui le reconnu, malgré son déguisement :

_ Bien le bonjour, cher maitre ! J'ai vu votre peinture, j'ai beaucoup apprécié l'ambiance. Mais la concurrence est rude, je ne saurai dire quelle oeuvre est la meilleure. Et vous, pour lesquelles avez-vous voté ?

Surpris, le voleur balbutia.

_ Heu ... et bien ... c'est-à-dire que ... je n'ai pas voté, en fait. J'ai totalement oublié que je pouvais également participer. D'un autre côté, je ne suis pas certain non plus de savoir faire une différence entre les différentes oeuvres proposées. Toutes sont belles, chacune a sa propre vision du thème. Il est extrêmmeent difficile de faire une analyse objective.

Il marqua une pause, songeur, puis reprit.

"Mais si je devais voter ... je dirais que l'oeuvre de Erkenbrand est ma préférée. Elle représente à la fois ce qui fut, dans la même idée de faste que moi, mais il rajoute également ce qui est, ce qui reste, montrant l'évolution, le changement. Sa technique est assez intéressante, également."

Son regard sembla fixer le vide, comme s'il revoyait l'oeuvre.

"Et la seconde serait celle de Kao xim. Simple, mais efficace. Il a su représenter la seule personne qui pourrait nous rappeler ce temps ancien. Je ne l'ai pas croisé, mais j'ai entendu quelques histoires à son sujet. De plus, un portait pour ce thème parait inattendu, c'est ce que j'apprécie."

Une fois son monologue terminé, il griffonna sur un bout de papier, et le tendit au passant.

"Tenez, pouvez vous me rendre un service ? J'aimerais que vous alliez porter ce papier, gage de ma participation au vote. Qu'on ne dise pas que je n'ai pas voulu donner ma voix aux concurrents !"

Il remercia le messager improvisé, puis repartit visiter les maisons du quartier, toujours à la recherche de mécènes pour financer ses oeuvres.

Dernière modification par Zephyr (31-01-2011 17:41:08)

Lamia, voyant Bernephos lui accorder encore quelques minutes de réflexions, se décida à voter.
Elle ne sentait pas l'âme d'une critique. De l'art, elle apprécierai plutôt la façon dont l'artiste permet l'intrusion dans son imaginaire, quelques concepts sortant des mouvements les plus répandus, bien que parfois comparable a une bulle éphémère en cas de concours tel que celui ci avec thème imposé.
Un choix ... Elle s'avança un désigna une première toile à l'arbitre : celle d'Erkenbrand, peut être inconsciemment tant ils passèrent de temps a discuter de choses et d'autres, mais c'était à la fois une atmosphère étrangère et familière.
Ensuite, entre celle de Valka, ce semble t il irrémédiable virage pris il y a de ça si longtemps, et celle de Kao Xim, un hommage si bien réalisé et mis sur le devant de la scène en mémoire d'un homme issu des ces âges ...
"S'il possible d'une égalité entre les 2 artistes, ce serait volontiers comme ceci que je tournerai mon vote, sinon, si vraiment il fallait trancher, l'ambiance torturée de Valka me transporte d'avantage."

Sur le départ, elle s'arrêta devant l'emplacement vide ... quel dommage de ne pas avoir pu être bercé par celle ci, à quoi pouvait elle ressembler.

Bernephos prit le parchemin tendu et le déroula. Il prit le temps d'une première lecture avant de reprendre tout haut, s'adressant à la foule :

_ Le vainqueur de ce concours, avec 24 points : Valka ! Pour son œuvre : Les temps anciens.
_ Deuxième place attribuée à Lamia, 18 points, pour sa toile intitulée Et du forgeron de ces temps.
_ Troisième place pour Kao Xim avec Valencian, 17 points.
_ En quatrième position vient Ronce, 15 points, pour Seul compte le Présent !
_ Pour finir, le désistement de Brittania laisse une place libre à un autre artiste. C'est donc Erkenbrand qui clôture les places d'honneur avec 11 points.

S'ensuivit les hourras de la foule, qui voulurent s'approcher pour voir de plus près les œuvres auréolées d'un prix.
Le mot laissé par Brittania était toujours accroché à la place de l'une d'elles, frémissant et claquant à chaque coup de vent comme pour rappeler sa présence.

Trahison.

C'est le seul terme qui puisse décrire ceci. Nous avons tous ici trahi, ou bien l'Art, ou bien nos convictions, sans même l'excuse du gain personnel. J'ai failli, moi aussi, mais j'espère pouvoir racheter mon écart.

Ce concours est faussé de façon irréparable. L'idée même d'un "concours de peinture" devrait faire rire : qui doit juger de la qualité d'une oeuvre ? Et surtout, comment en juger ? Un tableau à l'huile est-il meilleur qu'une gravure ? Une touche de rouge donnera-t-elle plus de points qu'une touche de bleu ? Une scène de Belerim sera-t-elle intrinsèquement meilleure qu'un paysage désertique ? Si l'on peut admettre que le jugement, subjectif, d'un individu ait un sens, la somme des jugements de personnes venant de tous horizons l'a perdu : elle n'est que soumission au consensus.

Mais, si ce problème était le seul, ce concours ne prêterait qu'à rire, pas à pleurer.

Dès le moment de sa conception, notre oeuvre vit sa propre existence : elle se libère de notre esprit, pour en féconder d'autres. L'artiste n'est qu'un simple vaisseau, un serviteur, une matrice qui aide à mettre au monde ce que les dieux ont imaginé. C'est ainsi que les hommes, les paysages, les hauts faits, les faits ordinaires, les rêves, le monde entier se reflètent dans nos toiles. L'artiste, donc, doit être fier de son pouvoir, qui n'est pas inférieur à celui d'une devineresse. Mais c'est lui qui sert l'Art, et non l'Art qui sert ses intérêts particuliers ; lui qui s'efface derrière ses augures, et non le contraire. Jamais, au grand jamais, une oeuvre ne devrait être créée pour un motif égoïste, que ce soit l'argent ou la renommée. Un tel acte est un manque de respect impardonnable envers les idées auxquelles on donne vie. Pire encore : c'est la vente de notre imagination - de notre âme ! - à notre vanité.

Les sables s'écoulent...