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Introduction
La nuit tombante, sur une colline au Nord de Delidar. Deux guerriers profitent des derniers rayons du soleil pour dépecer le produit de la chasse de la journée. Cette fois-ci c'est du Chat Talis et le travail avance vite, c'est hargneux mais pas gros comme bestiole. Un des deux hommes, un grand type aux épaules recouvertes d'une peau de tigre, pousse un soupir.
- Quelque chose qui va pas ? demande son compagnon.
- Rien de précis. Je suis juste... fatigué.
Et c'était la stricte vérité. Kain, Gardien remplaçant du Cerbère, était usé. Usé de faire le Gardien alors qu'aucun Astre ne l'avait élu. Quand il avait accepté le poste, dans sa tête c'était l'affaire de quelques mois, une année au plus. Ça faisait bientôt deux ans à présent, et il se demandait sérieusement quand le Cerbère ferait connaître le choix de son successeur. Diriger des gens c'était vraiment pas son fort. Bon comme dans toutes les grandes administrations le type au sommet n'avait pas grand chose à faire, la machine tournait toute seule, mais ça restait un fardeau de plus en plus lourd à porter alors que les mois inexorablement passaient sans signe qu'il en serait bientôt libéré. Les missions diplomatiques, les réunions du conseil où il n'était jamais sûr de piger ce qu'il s'y disait, les cérémonies officielles, ça avait jamais été sa tasse de thé, mais en ce moment ça lui retournait carrément les nerfs.
Il était usé de la chasse et de sa routine aussi. Même le Loup Infernal, animal qu'il avait toujours admiré et craint dans son cœur, était tombé face à son épée. Les journées se suivaient, monotones, et le plaisir du risque n'était plus là. Il repensa à ses aventures, à la fuite éperdue dans les rues de Belerim en compagnie de la jolie Belakassiah, aux ruines du désert et à sa traque de Yeux Jaunes, le tigre mangeur d'homme. Mais Yeux Jaunes était mort, ses yeux terribles remplacés par deux pierres brillantes, les ruines avaient livré leurs secrets sans lui et Bela avait perdu l'esprit, partie très loin là-bas dans le grand Nord.
Elle leur envoyait des nouvelles de temps en temps, malgré tout. Une légende courait dans la région où elle traînait ses bottes, la légende d'un Dragon. Bela et un Dragon, ça ce serait de l'aventure comme il n'en avait plus connu depuis longtemps! Il avait vraiment envie de suivre son exemple, de rallier le port le plus proche et de partir au bout du monde. Être un peu irresponsable pour une fois.
Un tintinnabulement d'holoring interrompit son train de pensées moroses.
- Kain, dit-il simplement en l'allumant.
C'était son ami Otto. Il venait de se faire attaquer par trois bandits, Qâ, Myhou et Stephen Alendorf. Kain soupira à nouveau, mais d'agacement cette fois. Les Oubliés avaient déjà corrigé ces trois idiots à Soumais, mais on dirait qu'ils avaient tous trois la tête aussi dure que déplaisante. Ils s'étaient mis à Soumais comme le vers dans le fruit et reprenaient leurs bêtises comme si rien ne s'était passé. Bah, ça ferait du changement.
Il se tourna vers Zébu.
- Une chasse aux affreux, ça te dit ?
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Chapitre 1 : le conte des trois bandits benêts.
Ça leur prit deux bonnes semaines pour redescendre sur Soumais, mais ils ne le regrettèrent pas. La veille au soir de leur arrivée dans la grande, bien que pauvre, cité, Kain reçut un nouvel holoring. La bande des trois bandits amateurs aurait encore embûché par surprise un Oublié du Temps, le pauvre Zentor, pour lui voler ses sous et ses carcasses.
- Ça tombe bien, on y est, répondit Kain avec un sourire mauvais. Si leur crâne est trop épais pour que la leçon rentre, on va l'ouvrir un peu pour aérer.
Le soleil de l'aube suivante les trouva devant les portes de la ville. Et qui virent-ils arriver, sifflotant gaiement et le nez au vent, se dirigeant vers ces mêmes portes ? Personne d'autre que Stephen Alendorf en personne. Kain le sentait, les Astres étaient avec eux aujourd'hui.
C'est bien cachés dans des fourrés qu'ils purent le regarder passer, malhonnête et insouciant, s'en allant dépenser les richesses acquises sur le dos des pauvres malheureux que lui et ses compères assassinaient dans la région. Il ne vit rien venir. La faucille de Zébu s'enroula autour de ses jambes, le faisant trébucher, et Kain frappa un bon gros coup du plat de son épée. Le premier bandit était tombé.
Pendant que Kain envoyait un message de victoire aux deux victime du trio des vilains idiots, Zébu fouillait le tas d'affaires laissé à terre par Stephen.
- Hé, vise un peu ça ! dit-il avec une note de bonheur dans la voix.
Se retournant, Kain vit qu'il tenait à pleine main une bourse d'arkhanas.
- Y en a au moins pour 500 arkhanas là-dedans, dit Zébu les yeux ronds.
- Le crime ne paie pas, mais la justice si on dirait, marmonna Kain tout aussi étonné. On devrait chasser le brigand plus souvent.
Ils décidèrent donc de passer chez l'antiquaire plus tôt qu'ils ne l'avaient prévu. Avant cela, Kain envoya un holoring aux deux bandits restant pour les avertir qu'ils venaient leur botter l'arrière-train. De toute façon avec le coma de Stephen l'effet de surprise était éventé. Ils reçurent une réponse de Qâ, pas très claire, où il disait en gros qu'ils étaient maintenant les chefs suprêmes à Soumais à eux trois, parce qu'ils l'avaient décidé, et qu'on allait voir ce qu'on allait voir, et que par contre est-ce qu'ils avaient amené des filles ? Assez content de voir qu'ils étaient tombés à un moment où leurs adversaires avaient beaucoup picolé, Kain se mit en route pour l'antiquaire en se disant tout de même qu'il aurait pu trouver plus prestigieux qu'une bande de poivrots comme ennemis jurés.
C'est en sortant de là qu'il tomba sur un Qâ courant vers lui comme un dératé, le couteau en main et tanguant dangereusement sur ses pieds, du moins c'est ce qu'il sembla à Kain sur le coup. Un petit pas de côté suffit et Qâ ne frappa que le vide, allant s'emplafonner contre le mur de l'antiquaire. Kain hésitait presque à lui proposer sa main pour se relever quand il se remit sur ses pieds tout seul et courut vers la porte de la ville, visiblement pour fuir. Kain se frotta la tempe. Décidément le prestige...
Il le rattrapa sans difficulté et frappa deux fois. Un coup pour le mettre à terre, et un pour l'achever.
- Et de deux, dit Kain sans grand enthousiasme. Tout cela était décidément trop facile et Qâ n'avait plus d'arkhanas dans les poches.
Il se dit que deux bandits sur trois c'était déjà un score honorable et que Myhou avait sûrement mis les bouts depuis longtemps. Mais son holoring sonna à nouveau. C'était Zentor, la dernière victime en date des bandits benêts, qui lui dit avoir croisé Myhou juste à la sortie Ouest de la ville. Kain hésita et puis se mit en route, n'aimant pas laisser un travail inachevé, même un travail aussi peu gratifiant. Zébu avait déclaré qu'il avait mieux à faire que de combattre des méchants qui frappaient comme des chèvres paralytiques et explosaient comme des pestules au moindre coup et il était parti se coucher.
En chemin Kain croisa à sa grande surprise Otto, Gardien du Talion et bon compagnon dans bien des aventures.
- Qu'est ce tu fais là ? demanda Kain.
- Ben je viens participer.
- Moi je veux bien mais y en a déjà deux de crevés.
- Déjà ?! s'écria Otto effaré.
- Ah ben qu'est ce que tu veux, c'est pas des flèches non plus...
Ils décidèrent de punir la dernière de concert et se mirent en route vers l'endroit indiqué par Zentor. Ils trouvèrent bien Myhou et mirent au point une technique en pince pour la finir. Malheureusement ils n'eurent pas le temps de l'exécuter. Au premier coup de Kain Myhou tomba dans les pommes, laissant Otto la dague en l'air et l'air fâché.
- Hé, t'as fini les trois à toi tout seul, faut partager! bougonna-t-il.
- Qu'est ce que j'y peux moi ? On comprend que Qâ réclame des femmes, celle qu'il a tient pas vraiment la distance...
Kain, victorieux mais déçu, contempla le résultat de sa traque. Trois cibles abattues et autant de frisson que la chasse d'un troupeau de blaireaux. Il avait vraiment besoin de passer à autre chose.
- Hé Otto, si on allait voir Bela ? demanda-t-il la mine songeuse.
Dernière modification par Kain (07-09-2010 19:17:16)
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La proposition de Kain claqua aux oreilles d'Otto comme un coup de fouet, le sortant de la torpeur dans laquelle il était plongé depuis la dernière saison maudite.
Ses pas l'avaient mené vers Soumais, comme attiré par l'odeur des scélérats qui y avaient établi leurs quartiers. Ses réflexes avaient été très mauvais quand il s'était agi d'éviter le couteau rouillé de Qâ, et il s'était retrouvé à l'auberge en compagnie de Zentor, qui souffrait du même Mal que lui. Ensemble, ils avaient chassé chats des mûres et opossums pour se requinquer, Otto avivant volontairement sa soif d'arkhanas pour permettre à Zentor de développer ses capacités, insuffisantes pour survivre dans cette région. Ils s'étaient jurés de se venger de la Maraude, et éprouvaient leur vaillance contre la faune locale. Puis était venu le temps de se séparer. Zentor, qui n'était pas Elu, devait retourner à Soumais pour échanger leur butin d'arkhanas contre de précieuses relicartes, et Otto prit la route du désert de Soumais écoutant les informateurs des Oubliés qui disaient que Myhou devait s'y trouver.
Il sillona seul ces longues étendues de sable sans s'arrêter, et n'y trouva que la compagnie des chauves-souris hurleuses et des scorpions. Ces derniers étaient des voisins fort appréciables pour qui désire la tranquillité, mais il aurait aimé pouvoir s'enfouir dans le sable comme eux pour ne plus avoir à entendre les chauves-souris. En remontant vers le Nord, il retrouva Kain et Zébu. Pas de trace de la bande à Myhou de leur côté non plus...
Bredouilles, ils rentrèrent vers Soumais. Otto, ne supportant plus la présence humaine, prétexta une piste potentielle pour faire un détour par la grouillante forêt de la Brêche. Bien mal lui en pris... Quelques jours plus tard, alors qu'araignées, sanglier et cerfs commençaient lui expliquer leur haine, il reçu un holoring de Zentor. Il était de nouveau tombé sous les coups de Myhou, à Soumais. Kain et Zébu étaient déjà sur place, et la chasse à l'homme était lancée...
Abandonnant sa nuée de vermine, Otto avait courru tout ce qu'il pouvait, la rage au ventre, pour finalement voir la dernière source d'arkhanas virevolter dans les poches du Cerbère. Curieusement, le Démon n'avait même pas réagit, comme s'il s'était résigné, comme s'il n'attendait plus rien de son hôte, attendant peut-être le suivant... Un sentiment d'inutilité envahit Otto, qui se surprit à regretter ces moments de lutte impitoyable contre son monstre intérieur...
C'est surement pour cela que quand Kain prononça le nom de la Lame, de la Traitresse, l'esprit d'Otto s'éveilla. La soif d'arkhanas l'avait quitté, et il lui fallait rechercher l'étincelle ailleurs. Un voyage pluvieux semblait en être une source intéressante. La recherche de la Lame, sous les auspices de la nouvelle Saison Maudite, attiserait surement le feu dans son oeil. La rencontre, si elle devait avoir lieu, lui apporterait sans aucun doute la Réponse qu'il cherchait depuis bientôt un an...
- Que les Astres te bénissent, Gardien des Âmes, pour cette idée lumineuse !
Revivifié, Otto ramassa les carcasses tombées de la gibecière de Myhou. Il fallait qu'il refasse un peu sa bourse, l'alcool n'avait pas été tendre avec l'usurier, et il aurait besoin de deniers pour prendre les flots...
Dernière modification par Otto (07-09-2010 22:16:36)
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Chapitre 2 : le conte du bandit balaise et bizarre.
Dernières vérifications. Kain avait vendu ses carcasses, acheté une épée toute neuve avant de placer le reste des sous de sa chasse chez ce voleur d'usurier. Il avait contacté le temple du Cerbère pour dire qu'il était en congé et qu'on ne le dérange pas à moins que Stella ne soit menacé d'imminente destruction. Sa peau de tigre bien lavée, ses bottes bien cirées, il était prêt à partir vers les terres du Nord avec Otto et Zébu, pour ce voyage dont il se demandait s'il ne serait pas le dernier.
C'est alors qu'il reçut un holoring d'Akita. Une rumeur se répandait dans les tavernes de Stella, un guerrier puissant hanterait les plaines au Sud de la grande cité. Sa curiosité émoustillée, elle demandait des renforts pour enquêter sur ce mystère.
En grognant Kain lui signala que la curiosité était un défaut de rôdeur et non de guerrier et que lui courir partout au petit bonheur la chance ça lui disait autant qu'un bon arrachage de dents. Malheureusement l'insistance d'Akita ne faiblit pas et usa ses réticences comme les vagues usent le rivage. Finalement, au lieu de partir vers l'Est comme ils se l'étaient promis, tout le monde mit le cap à l'Ouest, avec l'enthousiasme propre à une troupe de gens qui venaient déjà de se taper deux semaines de marche pour châtier trois rigolos.
En cours de route, une route infestée de monstres hargneux et têtus, il apprit que le guerrier mystère n'était autre que Masch, l'infâme scélérat qui avait aidé Qâ à l'assommer alors qu'il essayait de fuir Belerim pendant les sombres évènements du Tournois. En plus celui-ci venait d'abattre un jeune membre du temple de Kain, bien que présentement un peu éloigné pour cause d'amours adolescentes débilitantes, le petit Bedain. Au moins il n'était pas venu pour rien.
A l'issue d'un combat étrangement peu épique, Kain sentit un de ses derniers liens avec ce monde le quitter. Il avait toujours entretenu dans un coin de sa tête l'espoir que les astres lui donneraient l'occasion de se venger des seuls humains qui aient jamais réussi à le mettre dans le coma. C'était fait, et c'était une raison de moins encore de s'attarder parmi les hommes.
En plus il ne connaissait pas la région et allait encore devoir trouver un bateau maintenant.
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